Les femmes savantes

En tant que tapissier du roi, Molière faisait régulièrement le lit de Louis XIV. Il partageait ainsi un peu de son intimité.  J’aime à lire cette œuvre comme le prolongement public de ces conversations privées entre un artiste et son souverain. Versailles est le lieu du paraître. Trissotin vient, après Dom Juan, Tartuffe et le Jupiter d’Amphitryon, compléter la liste des grands imposteurs dont Molière s’est employé toute sa vie à arracher les masques.   Après avoir égratigné le grand seigneur méchant homme, le faux dévot et le dieu suborneur, il déshabille ici, plus cyniquement encore, l’arbitre des élégances.   Le critique, le conseiller, le membre de commission ou le chroniqueur de talk show avisé et proche du pouvoir, faisant l’opinion, et n’hésitant pas, au besoin, à couper les têtes.  Molière aime les femmes.  Et il les aime libres.  Il ne saurait ridiculiser grossièrement la résistance de Philaminthe au « bon sens » machiste de son mari sans désavouer du même coup à peu près tout ce qu’il a écrit avant.  Il va en conséquence déployer, dans Les femmes savantes, un comique subtil, articulé sur l’opposition entre nature et culture.  Les femmes savantes mettent en scène un des plus beaux trios amoureux de la littérature française, dominé par la figure de Clitandre, d’abord amoureux d’Armande, qui se refuse à l’amour charnel, puis d’Henriette, qui accepte de l’aimer en entier, réconciliant ainsi l’âme et le corps, l’esprit et la chair.  La nature et la culture.  En conversant librement avec son roi, Molière, mine de rien, pousse doucement la porte du siècle des Lumières.   Frédéric DUSSENNE

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Les femmes savantes