Voyage au bout de la nuit

« Le livre de Louis-Ferdinand Céline est un long cri qui n’a pas fini d’ébranler les hommes » a écrit Charles Plisnier en 1932, à la sortie du livre. Plus de quatre-vingt ans plus tard, la prévision s’avère on ne peut plus clairvoyante. « Ça a débuté comme ça » : passée la première phrase du roman de Louis-Ferdinand Céline, nous voilà comme absorbés par les mots ; son écriture nous bouffe, nous ravine et nous déporte dans le douloureux périple de Ferdinand Bardamu, de la première guerre mondiale au retour vers la maigre banlieue de Rancy, en passant par l’Afrique coloniale et ses sbires, l’Amérique et son travail à la chaîne - comme autant de points cardinaux de l’abrutissement et de la destruction de l’homme par l’homme.  Voyage au bout de la nuit est un roman fleuve, un plaidoyer atrabilaire de la condition des hommes d’une force émotionnelle et littéraire comme on en rencontre peu. Nous n’avons fait pour notre part qu’en aborder les premiers bouillonnements, ceux qui racontent le désastre et la boucherie de la guerre, l’humanité réduite à l’état de cette pourriture qui ne cesse aujourd’hui encore de contaminer le destin du genre humain, là où l’on découvre qu’ « on est puceau de l’horreur comme de la volupté », et qu’à vingt ans on n’a déjà plus que du passé.  La langue de Louis-Ferdinand Céline crache, éructe, braille, sanglote  et vomit, elle dit la tourmente et la convulsion du monde, mais aussi la douloureuse fragilité de l’homme. Nous aurons cherché avec Hélène Firla qui endosse la figure d’un Bardamu dessiné par Tardi, à la faire entendre dans tous ses registres, avec pour seul outil le frêle esquif d’un théâtre réduit à la parole.  Philippe SIREUIL

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Voyage au bout de la nuit